Nous sommes un petit nombre à pratiquer la randonue en conditions hivernales.
Pour qui n’est pas habitué, cela doit apparaître comme de la pure folie.
Or finalement, on s’aperçoit si l’on tente l’expérience que notre corps nu peut s’adapter d’une façon extraordinaire aux températures extrêmes.
Ainsi l’adepte du sauna se prélassera dans un air à 90° et celui de la randonue pourra évoluer par des températures inférieures à 0° dans sa tenue préférée. Il peu d’ailleurs s’agir de la même personne.
Il n’y a là aucun masochisme, que du plaisir.
Sur le glacier Noir (massif des Ecrins)
Je suis le premier étonné de ma possibilité d’ évoluer en randonue par des températures fraîches, voire négatives.
J’ai essayé de m’expliquer cela.
Certes, plus jeune, pratiquant l’alpinisme, le ski de rando et la spéléologie, j’ai vécu des situations de froid, même de très grand froid. Je me suis toujours entraîné à garder les mains nues le plus longtemps possible (on n’escalade pas bien avec de gros gants aux mains).
Mais je suis incapable (j’ai essayé) de rester nu plus de quelques dizaines de minutes dans ma maison avec 18° ; pas plus que je pourrais me mettre nu tout de go au départ d’une balade hivernale en sortant de ma voiture !
Rester nu par des températures proches de 0 dans la montagne nécessite une activité physique intense et un peu de soleil.
Je ne me déshabille qu’une fois atteint ce que j’appelle « le point de sudation » c’est à dire lorsque habillé, et marchant depuis une petit moment je ressent comme une bouffée de chaleur qui m’envahis.
Autre constatation : comme ma femme est farouchement opposée à la nudité en rando, lors de nos balades communes en été, j’ai souvent opté pour ne garder qu’un short, et bien j’ai vite froid ! et pas dans des conditions extrêmes, sinon elle n’aurait pas compris que je me mette torse nu.
J’en conclu que la nudité de l’entre jambe est essentielle dans le processus physiologique qui permet de s’adapter au froid.
J’émets l’hypothèse que pour « Dame Nature », nos organes sexuels sont tout aussi précieux que notre cerveau, puisse qu’ils sont indispensables à la conservation de l’espèce. Je serais bien étonné que cette partie du corps ne possède pas pour leur protection des capteurs thermiques primordiaux. Notre corps régulerait ses échanges thermiques en fonction des données acquise à ce niveau. La protection du sexe (et pas du reste du corps) faussant l’information engendrerait un déséquilibre, d’où une moins bonne adaptation à la situation.
Autre chose, on me dit que je marche vite. Je marche d’autant plus vite que je suis dans une ambiance fraîche. Pour me réchauffer bien sur, mais aussi parce que dans ces conditions la machine musculaire présente son meilleur rendement. Ce phénomène est bien connu des athlètes qui évoluent toujours en tenue légère. Aux jeux Olympiques de la Grèce antique, on courrait nu.
Giboulée de neige.
Certaines conditions climatiques sont indispensables :
Moins l’air contient d’eau (on le dit sec), moins il est conducteur de la chaleur, moins il y a d’échanges thermiques avec la peau. C’est la condition sine-qua non pour résister aux températures extrêmes qu’elles soient positives ou négatives.
Le soleil : la peau nue semble être un extraordinaire capteur solaire, car par -5° et sans vent un simple rayon de soleil suffit à procurer une sensation agréable de chaleur. Le moindre écran (un T shirt par exemple neutralise cet effet).
Ma mère m’a toujours dit « couvres toi, tu vas attraper la crève » . En fait je n’ai jamais attrapé de maladie lors d’exposition au froid en milieu naturel que ce soit en randonue en spéléologie ou en montagne.
Finalement, je voudrais aussi dire que marcher nu par temps froid nécessite probablement des prédispositions et comporte des risques. En plus des gelures possibles aux extrémités (doigts, sexe pour les hommes, seins, etc..), le corps se refroidit en profondeur et si l’on va trop loin le seul fait de se rhabiller ne permet pas toujours de se réchauffer. Un malaise par hypothermie est toujours possible.
Alors ne m’imitez pas sans précautions, n’allez pas trop loin dans vos expériences et prévoyez toujours d’emporter avec vous de quoi vous rhabiller chaudement.
Sur la neige, au soleil, que du plaisir !
Des sensations :
si je me réfère à une sortie que je considère comme un peu extrême :
température : légèrement inférieure à 0.
– ensoleillement discontinu.
temps d’exposition nu : 1 h.
dénivelé parcouru nu : 500 m à la montée, 150 m de descente.
Je n’avais pas très chaud, en pull à l’ombre sur la route, je me suis réchauffé en marchant.
Ce n’est qu’au bout de ¾ d’heure, en attaquant les pentes raides que j’ai ressentit la première bouffée de chaleur. Sans attendre la sudation, je me suis alors déshabillé.
Sensation de fraîcheur immédiate, tout à fait supportable d’autant que j’avais choisi pour cela un endroit ensoleillé ; mais aussi cette extraordinaire (et à chaque fois renouvelée) sensation de libération du corps des vêtements qui l’enserrent.
Un peu de froid, mais sans plus, lorsque je passe à l’ombre des épicéas, petite piqûres excitantes des bribes de neige qui tombent de temps en temps des arbres. Il est vrai que mon sac à dos me protège en partie.
Au début, j’avais l’onglée, mais la marche avec des bâtons sollicite les muscles des bras et rapidement mes mains se réchauffent. Par contre j’ai aussi l’onglée au bout du sexe et je suis obligé de le réchauffer dans ma main tout en marchant (je crains une gelure).
Certaines parties du corps se refroidissent sensiblement, la poitrine, les fesses, je passe ma main dessus est ressent une impression de froid. Cela est certainement du au retrait du sang vers les organes « nobles ». Ce sont aussi des zones qui comportent des graisses jouant le rôle d’isolant.
Je pense que le danger, s’il y en a un, viendrait de là car longtemps après m’être rhabillé ces zones contribuent à refroidir le reste du corps.
Un chute dans la neige provoque une brève sensation de brûlure froide, sans plus, mais à chaque fois l’équilibre thermique se dégrade, à moins de bénéficier ensuite d’une bonne exposition au soleil.
Dans ma descente sur le col, à l’ombre et au vent, j’ai eu vraiment froid : une sorte de contraction de l’ensemble du corps, à nouveau l’onglée, mais pas de frissons.
L’apparition de ces derniers sont pour moi le signe impératif qu’il faut se couvrir.
A l’arrêt pour me rhabiller, des crampes dans les jambes sont apparues. Ensuite, l’onglée à persisté longtemps, ainsi que la sensation de froid sur la poitrine, puis tout a fini par revenir dans l’ordre.
Cascade dans le vallon de Malissard (Chartreuse)
Voici, très vite, ce que l’on m’a appris (stages de montagne) sur le comportement du corps humain exposé au froid.
L’organisme tente d’abord de lutter contre le froid par la constriction des vaisseaux sanguins superficiels (de la peau) et par une activité musculaire superficielle (frissons).
Puis, si l’exposition perdure, la circulation sanguine va abandonner les espaces externes (pieds, mains, etc…) pour se concentrer sur les organes nobles (dont le cerveau). C’est là ou arrive le risque de gel.
D’autre part, il existe une série de symptômes de plus en plus graves qui apparaissent au fur et à mesure que la température centrale diminue, pouvant conduite à l’arrêt cardiaque.
Cette petite description s’applique bien à un individu à l’arrêt (alpiniste au bivouac, blessé, ou coincé dans une crevasse).
Pour un randonneur nu, actif, il me semble que le processus soit un peu différent. Comme il faut assurer l’activité musculaire, le retrait du sang des membres n’a pas lieu. Mais le refroidissement n’est pas non plus homogène. Les parties superficielles se mettent plus ou moins en équilibre avec le milieu extérieur, sans que cela ne gagne les organes internes.
Cela marche un certain temps, et tant que le « thermostat » de l’homme nu n’est pas masqué par des vêtements.
Lorsque je me rhabille, les capteurs thermiques sont d’un coup à l’abri du froid, et le sang périphérique est alors autorisé à rejoindre le sang interne, la température corporelle interne baisse d’un coup et apparaissent les symptômes afférents.
C’est pour cela, qu’il ne faut réchauffer quelqu’un en hypothermie grave que très lentement.
Je ne veux pas dire par là qu’il ne faut pas se rhabiller, mais au contraire qu’il faut anticiper et le faire à temps. Car c’est à ce moment là où apparait le plus grand risque de malaise.
Baignade dans le lac de la Mariande (2604 m, massif des Ecrins)